🔌 Pékin produit, l’Europe consulte : une souveraineté sous-traitée

À première vue, tout semble aller dans le bon sens : les énergies renouvelables explosent, la transition énergétique est sur toutes les lèvres, et les plans industriels européens fleurissent. Sauf que… pendant que l’Europe parle, la Chine construit.

🏭 Made in China, installé partout

La Chine détient aujourd’hui près de 80 % des chaînes de production solaire mondiales, produit 74 % des batteries lithium-ion, et commence à dominer l’éolien offshore. Elle inonde les marchés de ses technologies subventionnées, tout en investissant à l’étranger via la Belt and Road Initiative. En clair : Pékin finance, construit et impose ses standards techniques, logistiques et diplomatiques. Résultat ? Des infrastructures livrées clés en main, qui font rougir les performances occidentales 👉 EnergyNews.

En moins d'une décennie, la Chine n’a pas seulement produit plus vite : elle a créé un écosystème verticalement intégré, allant des terres rares aux onduleurs. Pendant ce temps, l’Europe a externalisé, délocalisé, puis redécouvert la dépendance comme on redécouvre une vieille dette qu’on croyait oubliée.

📉 L'Europe, championne du rétroplanning

Face à cette offensive, l’Union européenne s’active… sur le papier. Net Zero Industry Act, Global Gateway, IPCEI, Critical Raw Materials Act : les acronymes se multiplient, les rapports aussi. Mais les résultats concrets restent anecdotiques. Aujourd’hui, 97 % des panneaux solaires installés en Europe sont importés 👉 France Info. Les usines prévues mettent des années à sortir de terre, faute d’investissements, de foncier, ou de décisions claires. On célèbre la “relance industrielle” à coups de rubans coupés… pour des projets qui produiront (peut-être) en 2030.

Mais d’ici là ? Les gigawatts installés seront chinois. Et la dépendance renforcée.

🎭 Tragédie ou comédie géopolitique ?

On dénonce la dépendance aux équipements chinois… tout en les subventionnant indirectement via des aides à l'installation pour les particuliers. On parle de “souveraineté énergétique”, mais la France refuse les panneaux chinois au nom du patriotisme économique, sans proposer d’alternative viable. Résultat ? Pas de panneaux du tout. Ni made in France, ni made in China.

L’Europe devient ainsi la première zone du monde à planifier sa transition énergétique sans en maîtriser ni les ressources, ni les technologies, ni les moyens de production. Et pendant qu’on débattait de la taxonomie verte, Pékin rachetait des mines de lithium au Zimbabwe et construisait des ports en Afrique de l'Est.

⚙️ Lueur d’espoir… ou dépendance 2.0 ?

Oui, des projets voient le jour : Verkor pour les batteries, Holosolis pour les panneaux, Carbon pour les cellules photovoltaïques. Mais ces initiatives sont des îlots dans un océan de dépendance. L’annonce d’une usine de DAS Solar en Bourgogne, par exemple, symbolise autant un retour de l’activité qu’une forme de résignation : relocaliser, oui, mais avec du capital, des machines et un savoir-faire… chinois.

Peut-on parler de souveraineté lorsque l’essentiel de la chaîne de valeur reste étrangère ? Ou s'agit-il d'une nouvelle forme de dépendance, simplement rapatriée sur notre sol ?

🔍 Et maintenant ? L’Europe face à son dilemme stratégique

La vraie question n’est plus de savoir si la Chine domine. Elle l’est déjà. Il s’agit de savoir si l’Europe veut redevenir une puissance industrielle ou se contenter d’être un marché final. Cela implique des choix douloureux : investir massivement, simplifier les normes, sécuriser l’accès aux ressources critiques et accepter une forme de compétition stratégique. Pas seulement avec la Chine, mais aussi avec les États-Unis, dont l’Inflation Reduction Act a attiré des projets industriels européens entiers.

Plus encore, cela suppose de trancher un nœud gordien politique : veut-on une transition énergétique au moindre coût, quitte à être dépendant, ou une transition souveraine, quitte à en payer le prix ?

Conclusion : Souverains… sous conditions ?

Pour que la transition énergétique rime avec souveraineté, encore faut-il que les actes suivent les mots. Tant que l’Europe hésite, elle perd. Et tant qu’elle perd, la Chine gagne. C’est la logique froide de la géopolitique industrielle. Construire une souveraineté énergétique ne se fait pas à coups de PowerPoints ou de sommets climatiques, mais d’investissements concrets, de prises de risque industrielles et d’une vision long terme, au-delà des cycles électoraux.

À moins que le vrai projet européen soit ailleurs : rester propre… en sous-traitant le sale boulot.